Surconsommation de pilule rouge
dimanche 5 décembre 2004 | Pilule Rouge
Finies les geekeries, cette semaine c'est philosophie. Parce qu'il n'y a pas que JCVD qui a le droit d'être aware.
Il y a quelques semaines, des scientifiques ont suggéré que le monde dans lequel nous évoluons serait une immense simulation conçue par un ou des êtres supérieurs pour étudier nos comportements. Rien de franchement nouveau. Un peu comme un semblant de divinité dont la passion entre deux bières serait de secouer la boîte, de temps à autre, pour étudier les réactions de ses occupants. Une idée à peine suggérée par Matrix, déjà bien fourni en références à la mythologie grecque et au bouddhisme. Le mythe de la caverne a la vie dure... Passons sur le côté paranoïaque de cette révélation, personne n'a envie de se retrouver coincé dans un remake du jeu The Sims.

Mis à part le fait qu'il faudrait une sacrée bête de course contenant plus d'atomes que notre monde actuel (sachant qu'un corps humain en contient déjà dix mille quatrillions - 1028 et que l'univers approcherait des cent terdécillions - 1080 - je vous laisse imaginer la taille des barrettes de ram nécessaires - oops on avait dit pas de geekerie...) pour recréer l'illusion d'une réalité atome par atome, et pour induire les scientifiques en erreur : éviter que tels Icare ils ne brûlent leurs ailes en voulant percer trop en avant le mystère de la réalité. Car il faut bien reconnaître que toutes les lois, fussent-elles toutes récentes ou quantiques, s'articulent plutôt bien entre elles. Pour l'instant.

Cette simulation durerait depuis un bon bout de temps déjà, ou alors aurait été créée de toutes pièces. Du pur gnosticisme, caricaturé à l'envi par les stratificatrices de Terry Pratchett (dans Strate-à-gemmes), créant de nouveaux mondes et déposant de faux fossiles dans le sol, destinés à prouver la véracité de l'existence aux futurs habitants de ces mondes. De quoi mettre le darwinisme en route dans n'importe quelle civilisation un tant soit peu intelligente (ie : qui n'a pas encore atteint l'ère du skyblog). Une théorie fantaisiste de la création, mise à mal par des plaisantins qui glissent des anachronismes dans les strates géologiques les plus profondes, comme un squelette de dinosaure tenant une pancarte "non aux essais nucléaires".
Ce programme serait pourtant légèrement foireux mal conçu, entre les pandémies de grippe avec des millions de morts, les blogs d'adolescentes dépressives et le Le Journal de Max (fake ? fake...) ? Qui pourrait croire qu'il s'agisse de tests destinés à mettre à l'épreuve notre stabilité émotionnelle.

Comment croire que tout ce qui est organique, chaotique, aléatoire n'est que pure organisation ? Les arts seraient préconditionnés ? La notion du bien et du mal ne serait-elle qu'une variable ? Au-delà de la grande question de savoir si nous existons, il importe de savoir ce que nous faisons et qui nous sommes. Même si nous devions être des impulsions électromagnétiques, notre existence ne serait pas pour autant remise en jeu. Et notre libre arbitre ? Serait-il gouverné à l'échelle macroscopique par des routines dont les paramètres fluctueraient au gré des envies de nos geôliers pour agir sur des groupes de personnes, mais individuellement nous serions... libres ? Nous pourrions alors introduire suffisamment de grains de sel pour faire tourner la sauce à notre manière... En espérant que ce ne soit pas encore là une réaction prévue d'avance, initiée par les stimulis artificiels. Que penser alors des religions, des expériences mystiques, de ces signaux avec cet(ces) être(s) supérieur(s) ? La réponse dans une autre existence grâce au bug de la réincarnation. (Vous êtes fous d'avoir lu jusqu'ici).

Sur ce, il faut que j'aille compléter ma wishlist de Noël. On a beau être métaphysiquement indécis, on n'en est pas moins attaché aux traditions bassement matérialistes.
Je pense, donc je suis.
Descartes