Parce qu'il n'y a pas que TF1 qui a le monopole des bovidés en prime-time, France 2 brandit son joker. Et pas n'importe lequel. Une émission qui n'a jamais vraiment quitté le paysage télévisuel. Une émission qui donne encore toujours aujourd'hui l'impression que Guynux et Léon vont ressurgir dans l'arène pour nous faire vivre de nouveaux moments merveilleux de glissades, noyades, tapis roulants savoneux, courses costumées et autres jeux tout droit sortis de l'imagination d'un vendeur de Hansaplast. Intervilles.
La formule est simple et relativement peu coûteuse. Les jeux d'eau ne réclament que quelques bassines en plastique, bols et rouleaux de scotch cherchés en vitesse au Carrefour du coin. Les candidats sont ensuite ravis de se faire interviewer, trempés, devant la France entière après s'être gamellisés plusieurs fois de suite tête la première dans la flotte.
Revue au goût du jour avec des danseuses pom-pom et une vachette modélisée en 3D, l'émission n'a pourtant pas renié ses origines. Les costumes en mousse sont toujours les mêmes : les plus ridicules et bouffis possibles, de préférence en forme de légumes.
Ceux-ci ne résistent pas 10 secondes aux assauts de la fameuse vachette, aussi piquée que le plus dopé des coureurs du tour. Un peu de sciure dans une arène, un passage à la ferme du coin, deux rouleaux de scotch (toujours les mêmes) sur les cornes et c'est parti pour un moment de gloire éphémère pour le ruminant baveux.
N'oublions pas les tartes à la crème et le traditionnel plan incliné qui vaudra au vainqueur une renommée internationale dans son quartier... sa rue... allez son immeuble ("Moi j'ai gagné au plan incliné Intervilles 1982! Sisi j'ai encore la cassette que mamie Germaine avait enregistrée.") et une honte à vie pour le perdant, qui sera renié par sa femme, ses proches, son employeur et n'aura d'autre choix que d'émigrer en Estonie pour se vouer corps et âme à la pêche au phoque.

Mais ce qui reste certainement l'épreuve culte unique au monde, c'est bien sûr celle des pelleteuses qui doivent déposer des morceaux de sucre avec la dextérité d'un manchot qui doit manger avec des baguettes chinoises. Je veux dire par là que c'est vraiment le seul endroit sur Terre où l'on peut s'extasier devant cette prouesse technologique et humaine, qui tient en haleine plusieurs milions de spectateurs, suspendus au devenir de ce petit morceau de glucose criant éperduement à sa perte, dont la fin ne sera en aucun cas joyeuse : broyé ou dissous.

Cependant, l'élément du spectacle qui surpasse tout, unique au monde lui aussi, c'est Robert Wurtz. Robert Wurtz mon idole. Ancien arbitre de ballon rond, qui se montre impartial, dans cette lutte des "ROUCHES CONTRES LES PLEUS !", à l'accent trop alsacien pour être honnête. Pour en revenir à cette fameuse épreuve des pelleteuses, celui qui y croit le plus, c'est Robert. On sent bien toute la tension qui se dégage du personnage. Et c'est là que la phrase culte sort, au moment où le sucre reste tragiquement collé à une des dents de la pelleteuse, dans la moiteur de ce soir d'été, et que Robert doit accorder quelques secondes de plus à l'équipe : "C'est comme si on jouait les arrêts de jeu parce qu'il y avait un sucre blessé".
Bravo Robert, ce ne serait pas la même chose sans toi.